samedi 23 février 2019

Elan vital et identité



Elan vital et identité

Elan vital et identité
Les voitures et les bus brûlent. On aimerait demander aux jeunes de stopper leurs bêtises, et certaines bonnes consciences vont réclamer, s'ils recommencent, qu'ils soient « sévèrement » punis. Oui mais ils imitent ! Ils imitent les adultes qui brûlent des vies par leurs guerres pétrolières, qui brûlent les bonnes initiatives par leurs obstructions administratives et financières, qui brûlent les ressources de la terre par leurs acharnements et harcèlements commerciaux pour une extension de territoire, qui brûlent tout ce qu'ils trouvent sur leur passage au nom d'un militantisme exacerbé, qui brûlent leur santé par des comportements aberrants. Les manques de repères ne peuvent être imputés uniquement aux seuls jeunes des banlieues et les déracinements aux seuls étrangers africains. La perte des racines, de la véritable agriculture, donc de la nourriture, de notre vraie nature, ce que la terre nous donne et la méconnaissance de l'Elan vital, ce que le ciel nous donne, pervertissent l'identité de la personne et de l'humanité. La condition de la santé pour les individus et de la paix pour les peuples passe par le respect de l'Elan vital individuel, dont l'expression de créer son œuvre dans un collectif à « taille humaine » va lui permettre de se sentir utile. Garder ou retrouver son identité en se réappropriant le sens de son Elan vital propre pourrait bien être le pari d'une paix intérieure contagieuse. Intégrer son élan vital consisterait à retrouver l'écoute du cœur qui satisfait sa propre cohérence interne : être bien avec ce que l'on est, ce que l'on dit, ce que l'on fait, ce que l'on pense, dans l'espace de son existence, qu'intuitivement et instinctivement on souhaiterait fluide et apaisée.

La propulsion de la force de l'élan vital : l’énergie première.
Une chaleureuse fusion initiale d'un homme et d'une femme a libéré, l'ocytocine, hormone d'amour, dans leur cerveau le plus intime, pour expulser hors de son corps, des milliers de spermatozoïdes pour le père et pour les incorporer encore plus, particulièrement par un ovule pour la mère. Le grand yin, l'apparente inertie de l'ovule, a choisi et accueilli un petit yang, un spermatozoïde et ses petits mouvements. Une incroyable force d'existence naît alors, de cette fusion atomique puissance « n », après un temps et une transformation harmonieuse, continuelle et fluide, sans à-coups. Patiemment, durablement, à la mesure d'un métronome saisonnier, cette suprême énergie, dont les scientifiques n'en ont pas encore fait le tour, va se guider vers son absolu, en développant sa complexité ordonnée. La démonstration de cet événement nous montre qu'une humble et forte réceptivité et des petites actions et mouvements réguliers créent la vie. Par des acquisitions et des petites morts successives, ce potentiel vital s'inscrit dans une chaîne d'humanité, d'apprentissages en transmissions de savoirs. Condamner à aller vers son devenir, la conaissance de soi se décline donc plus par la progression plutôt que par la régression. Ce potentiel nous est donné d'une manière inégale pour chacun de nous et reste cependant soumis à des règles communes et identiques. Initialement chaque ADN, empreinte digitale, unicité, spécificité qui marque notre identité, poursuit la même volonté : certain de posséder et de véhiculer un trésor intérieur, l'être veut vivre harmonieusement en bonne santé, et suivre son mouvement d'expression de son être, quelles que soient les cultures. 

Le Tao ne connaît ni les clans, ni les frontières, ni les cultures. Nous sommes tous construits sur les mêmes structures, les mêmes règles des composantes corporelles et incidences émotionnelles que nous devons apprendre à gérer. Encore faut-il reconnaître ce potentiel. L’Elan vital nous amène à développer ce qui nous est propre, ce qui fait notre identité, ce pourquoi nous sommes faits. L’aboutissement de son œuvre, dans l’amour, dans un collectif respectueux, dans le juste, le bon, le beau, constitue la racine et le projet de chaque individu. Viendra bien un jour où la recherche sur l'ADN ne se contentera plus d'une simple réduction d'une correspondance avec un acte criminel, ou d'un aveu de paternité, pour se plonger dans l'émergence d'un véritable savoir-faire unique, privilégié, délivrant l'orientation professionnelle de l'individu. Le non-respect de cette trajectoire initiale et de son énergie vitale entretenue, entraîne toutes sortes de déviances en termes de maladies, violences, ou autres inadaptations et errances pathologiques personnelles, relationnelles ou sociales.
Nous devons réapprendre à suivre ce courant d’énergie, pour rester en bonne santé mentale et physique. Encore faut-il être à l'écoute de ce potentiel. Ce courant ne peut s'entendre que dans un Coeur recueilli, animé par le sourire intérieur. Plus il est en concordance et en adéquation avec lui-même, plus ce coeur a le sentiment du bien-être, conscient de sa force, de son épanouissement, de sa sérénité dans sa transformation perpétuelle. La clarté du cœur est au plus proche de l’identité.

L'élan premier, entretien de l'énergie vitale, sel de la vie.
Sa vie est mouvement, son mouvement est énergie. L'énergie corporelle, dans ses va et vient, montées et descentes, entrées et sorties, est au service de sa valeur intrinsèque. Elle se distingue dans ses trois appellations : le jing, celle qui correspond à l'élan de la fécondation, et porte le Chi : seconde énergie indispensable, correspondant aux souffles et à la nourriture, alchimie énergétique qui devient elle-même porteuse de la troisième : le shen, la conscience de son existence. Notre responsabilité d'humain est d'entretenir ces trois dimensions. L'Elan vital ne nous est pas donné, une bonne fois pour toute, sans notre effort et notre accompagnement du maintien de notre vie. L'Elan vital doit se transformer en énergie vitale. Si le souffle et le mouvement manquent, le shen, la conscience est perturbée. Inversement un être qui se traîne dans la boue peut retrouver sa véritable conscience, identitaire, par le mouvement et l'entretien de ses souffles. L'unification des trois tan-tien ou foyers que sont la tête et la poitrine, le ventre, le bassin représente l'unification de l'Intention, du souffle, de l'action. De cet effort constant de recentrage et d'entretien de ces trois pôles s'extériorise du plus profond de l'être l'expression unique de son œuvre. A l'image du saunier qui, à partir de son travail de gestion, d'organisation, de filtrage d'un œillet à un autre, avec une patience fluide, sait s'adapter et profiter du soleil, du vent, de l'évaporation de la mer pour extraire le sel, l'Elan vital originel, contenu et transformé par l'énergie vitale, va faire jaillir le joyau de la créativité, pour être en accord avec soi-même. La prévention de la santé commence par le respect de soi qui commence par l'écoute de son élan vital, l'entretien de son énergie et la confiance en celle-ci, pour grandir dans sa conscience et faire éclore son soi existentiel.

Le cycle saisonnier et le respect de la vie
Outre le fait que la naissance s'enregistre sur une donnée saisonnière et énergétique précise, indicatrice de certains comportements appropriés, le parcours d'une vie terrestre, comme chaque action se déroule sur le schéma d’une année avec ses saisons :
-Jaillir et déployer, printemps, début de vie, la réalisation par le jeu ;
-Prospérer et développer, été, jeunes adultes, la réalisation par l'expérimentation et la recherche ;
-Stocker et équilibrer, automne, vie adulte, la réalisation par le savoir-faire ;
- Fermer et thésauriser, hiver, fin de vie, la réalisation par la transmission du savoir-faire et le recueillement.

Le respect du rythme corporel, la reconnaissance de la progression d'une action, à l'image d’un cycle saisonnier, l'adéquation de l'activité avec son identité propre, renforcent l'accomplissement de l'œuvre, l'inverse va vers sa destruction. Non seulement il est nécessaire de ré-alimenter son mouvement initial de naissance, non seulement, il est nécessaire d'unifier ses trois tan-tien, non seulement il nous faut écouter la voie de notre cœur qui correspond à notre identité propre, mais encore faut-il respecter les rythmes de bases, d'activité et de repos, de nuit et de jour, de réflexion ou d'action, de naissance ou de mort. Le respect de l'identité, de l'oeuvre, du rythme de chacun consolide le lien et la concordance sociale. Ces balises du suwen ainsi présentées, il nous est facile de repérer ce qui n'est pas tout à fait conforme à notre vraie nature dans les violences quotidiennes que nous choisissons ou subissons.

A quoi tu uses ton énergie ?
La volonté de paix intérieure, l'apaisement du mental quand le cœur est en affinité complice avec lui-même, c'est à dire avec le Tao, ne correspond pas toujours, loin s'en faut, avec les dictats d'un système bancaire, fier de ne pas être philanthrope, c'est à dire de ne pas aimer les humains. La norme sociale imposée par la loi du marché, du plus riche qui se croit le plus fort, dénature violemment les rythmes, la loi du cœur, et donc blesse les « shen » individuels et donc les consciences. Les temps de prises de recul peuvent nous conduire à un discernement plus élaboré pour une plus grande relation intime avec nous-même.

Une société qui dénie l'existence du courant vital, de l'œuvre personnelle à accomplir, de cette profondeur de la conscience individuelle à se réaliser, perd ses racines et se rend malade, tourne le dos à la créativité pour développer et organiser du gâchis humain. Le détournement, la destruction, l'usurpation, de l'énergie vitale, au profit d'un produit, la parole de l'argent à la place de celle du cœur ne peut qu'engendrer haines et violences, souffrances et maladies.

Il n'y a pas que la société anonyme pour perturber le bon sens des choses ! Chaque personne peut s'y employer. Mais en général, si elle prend ce chemin c'est qu'elle a pris pour argent content ce que sa génération instructrice lui a demandé de croire : le bien fondé d'une malhonnêteté intellectuelle, la croyance d'un hypothétique bonheur dans la compétition pour une consommation surajoutée. Elle ne prend pas le temps de regarder à quoi elle use sa propre énergie, perdant ainsi le fil de son essentiel. Son existence ne semble plus avoir de valeur à ses propres yeux, en s’avilissant à une dépendance arbitraire.

En continuelle déstabilisation dans sa marche vers son devenir, l'adulte est invité au recentrage, c'est à dire à la vérification de son harmonie existentielle avec son diapason, son « LA » originel, son élan vital. Faut-il rappeler que Ming-men, lieu énergétique de la colonne vertébrale situé entre les lombaires 3 et 4, se traduit ”porte du mandat céleste”. Loin d'être une figure de style pour faire joli, il s'agit d'une véritable force qui pousse à l'accomplissement de son destin.

Pour se réapproprier le contact avec son Essence, certaines approches favorisent cette expérience singulière d'être “juste” avec soi, avec ses ancêtres, son potentiel, et sa responsabilité d’être: la synthèse après une méditation, le massage taoïste, l'écriture, l'expression par l'argile, la peinture, la musique et la création sans jugement ainsi que l'écoute des rêves.

L’écoute du spontané innocent bref l'accueil d'un grand Yin, la confiance en son énergie et la mise en oeuvre d'un petit Yang, la volonté de se sortir de son marasme et de retrouver son être, son identité par de petits mouvements. Respecter son énergie qui ne demande qu'à vivre, mettre en forme son être profond, accéder à ce quelque chose d'intime, qui nous aspire à ce quelque chose qui nous dépasse, et qui rejoint tous les êtres.